C’est historique : TotalEnergies a fait face à la justice pour répondre de son greenwashing et justifier la “stratégie climat” qu’elle met en avant auprès des consommatrices et des consommateurs. C’est la toute première fois qu’un tribunal français est amené à se prononcer sur la sincérité des engagements climatiques d’une entreprise fossile.
En mars 2022, aux côtés des Amis de la Terre France et de Notre Affaire à Tous, nous avons assigné la multinationale française en justice pour pratiques commerciales trompeuses. En cause : ses campagnes publicitaires qui, en vantant notamment ses investissements dans les énergies renouvelables, viennent détourner l’attention de ses réelles activités centrées sur le pétrole et le gaz.
Toujours plus de pétrole et de gaz
En 2021, Total change de nom pour devenir TotalEnergies. Cette nouvelle identité lui permet de se présenter comme un acteur majeur de la transition énergétique, investi dans le développement d’énergies multiples, et de prétendre viser un objectif de neutralité carbone d’ici 2050.
Extrait du site internet de rebranding de TotalEnergies publié en 2021.
Car oui, TotalEnergies reste, et a bien l’intention de rester une entreprise du pétrole et du gaz. En 2024, les énergies fossiles représentent plus de 97 % de sa production énergétique globale et près de 80% de ses investissements. Elle prévoit même de continuer à augmenter sa production d’hydrocarbures dans les années à venir.
En concentrant ses publicités sur les éoliennes et les panneaux solaires, la multinationale détourne l’attention du public de ses activités polluantes. C’est ça, le greenwashing, une stratégie marketing utilisée par une entreprise pour verdir son image.
“Le gaz, une énergie de transition”. Vraiment ?
Parmi les arguments préférés de TotalEnergies pour défendre sa stratégie, on retrouve le gaz fossile présenté comme une “énergie de transition”. La multinationale n’a de cesse de vanter le gaz comme étant une option “moins polluante” et “moins émettrice de gaz à effet de serre” que les autres énergies fossiles. Ce discours, omniprésent dans ses publicités, induit les consommatrices et consommateurs en erreur sur les véritables impacts de cette énergie tout au long de son cycle de vie.
Le gaz est bel et bien une énergie fossile, au même titre que le charbon et le pétrole. Il n’est en rien propre ou bas-carbone. Il génère d’importantes émissions de gaz à effet de serre, notamment du fait des fuites de méthane dont le pouvoir de réchauffement global est en moyenne 84 fois plus élevé que celui du CO₂.
Une torchère à gaz qui brûle © Les Stone / Greenpeace
TotalEnergies n’a d’ailleurs pas recours au gaz comme une simple énergie “de transition” mais vise au contraire à en développer massivement l’exploitation, au risque de verrouiller notre dépendance aux énergies fossiles sur plusieurs décennies.
Au-delà de ses effets climatiques désastreux, l’exploitation du gaz a d’autres conséquences graves : dommages environnementaux considérables, destruction de la biodiversité, violations des droits humains, déplacements de populations…
Cette stratégie est aussi une aberration sociale et géopolitique car elle nous fait dépendre d’une énergie dont le prix fluctue fortement et met en péril notre souveraineté énergétique vis-à-vis de pays comme la Russie de Vladimir Poutine ou les États-Unis de Donald Trump.
Bientôt la fin de ce greenwashing ?
En poursuivant sans relâche le développement des énergies fossiles, TotalEnergies continue de détraquer le climat et de mettre en péril nos conditions de vie et notre avenir. Ses discours verts, son changement de logo et ses publicités ne changeront rien à ce désastre. Ses investissements actuels dans les énergies renouvelables non plus puisqu’elles ne viennent pas remplacer sa production d’énergies fossiles, qui elle continue d’augmenter, en dépit de tout bon sens climatique.
Face à une crise climatique qui s’aggrave, en grande partie à cause des activités de cette industrie mortifère, nous demandons à la justice de protéger les consommatrices et consommateurs vis-à-vis de la désinformation environnementale. C’est pour cette raison que, avec les Amis de la Terre et Notre Affaire à Tous, nous avons assigné TotalEnergies en justice.
Le droit de la consommation est clair : il impose une communication honnête et vérifiable, y compris en matière climatique et environnementale. L’audience du 5 juin pourrait créer un précédent important en France et à l’international et envoyer un signal fort à l’ensemble des entreprises des énergies fossiles.
La justice va devoir trancher : les promesses climatiques peuvent-elles continuer à être brandies comme arguments de communication bien qu’elles masquent des choix industriels incompatibles avec les objectifs affichés ? Réponse le 23 octobre 2025.